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April 26, 2017

En Inde aussi, l’extrême droite est en finale [In India too the Extreme Right is in the Final] (Guillaume Delacroix)

Mediapart.fr - 26 avril 2017

En Inde aussi, l’extrême droite est en finale

Par Guillaume Delacroix Blog : MAXIMUM INDIA

Les parlementaires indiens sont appelés à élire le président de la plus grande démocratie du monde au mois de juillet. Le favori est Mohan Bhagwat, chef du mouvement RSS, incarnation de l’idéologie nationaliste hindoue dans le sous-continent.

En Inde aussi, la bataille présidentielle fait rage. Le 26 juillet prochain, Pranab Mukherjee cèdera la place à son successeur à Rashtrapati Bhavan, le palais trois fois plus grand que la cité du Vatican, où le chef de l’Etat dispose de 340 pièces au milieu d’un parc de 13 hectares, en plein coeur de Delhi. Comme en France, les spéculations vont bon train, à mesure que l’échéance du quinquennat approche. Difficile, à ce stade, de ne pas faire de comparaison avec le duel qui oppose Emmanuel Macron à Marine Le Pen pour le second tour de l’élection présidentielle française.

Ce sont en effet les représentants du centre gauche et de la droite extrême qui fourbissent actuellement leurs armes. Sauf qu’ici, c’est le second qui est favori. Son nom? Mohan Bhagwat. Agé de 66 ans, il dirige le Rashtriya Swayamsevak Sangh (Corps des volontaires nationaux, RSS), un mouvement idéologique qui forme la jeunesse en bermuda kaki, en lui inculquant la supériorité de la nation indienne et de la religion hindoue sur tout le reste. Cette organisation a pour vitrine politique le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP) du premier ministre, Narendra Modi.

En face, tous les partis opposés aux gouvernants actuels sont en état de sidération. La vague safran qui déferle sur l’Inde, scrutin après scrutin, a été encore plus forte en mars, avec une victoire éclatante des nationalistes, en Uttar Pradesh notamment. Pour tenter de l’endiguer, le Parti du Congrès (centre gauche), le Parti communiste marxiste et les principales formations régionales de teinte socialiste - le Janata Dal (United) party de Nitish Kumar au Bihar, le Samajwadi Party d’Akhilesh Yadav et le Bahujan Samaj Party de Mayawati en Uttar Pradesh pour n’en citer que trois - s’en remettent à Sonia Gandhi pour dénicher un candidat qui satisfasse tout le monde.

Mohan Bhagwat contre Sonia Gandhi, quelle affiche ! L’Inde n’est pas très rompue à la dictature des sondages, contrairement à la France, mais il suffit de s’en remettre à l’arithmétique pour comprendre rapidement pourquoi le premier, qui fut à l’origine du fan-club de Modi lorsque celui-ci n’était encore que ministre en chef du Gujarat, a de très grandes chances de gagner.

Le régime politique indien étant parlementaire, l’élection du président s’opère au moyen d’un scrutin indirect passablement alambiqué. Ce sont les 776 députés et sénateurs fédéraux, ainsi que les 4120 parlementaires des vingt-neuf Etats fédérés, qui constituent le collège électoral. Les uns et les autres disposent d’un nombre de voix qui varie en fonction de la population qu’ils représentent dans leurs institutions respectives, sur la base du recensement de 1971.

Cela représente 1 098 882 voix. Pour être élu président de l’Inde, il faut donc rassembler sur son nom 549 442 voix (50% + une voix). Etant donné les victoires à répétition du BJP et de ses alliés depuis 2014, la droite nationaliste en contrôle aujourd’hui 532 000, soit 48,4% du total. Autant dire que c’est elle qui choisira le successeur de Pranab Mukherjee.

Que ceux qui s’en émeuvent se rassurent : en Inde, le président ne sert pas à grand chose. Qui sait, en France, que l’actuel locataire de Rashtrapati Bhavan a sa carte au Parti du Congrès, opposant numéro un au BJP de Narendra Modi ? Et qui sait qu’avant lui, c’était une femme qui occupait la fonction, Pratibha Patil, elle aussi du Parti du Congrès ? Détail qui a son importance, Pranab Mukherjee a la possibilité de se représenter, si Sonia Gandhi ne trouvait personne. Voilà une différence majeure avec la France, où l’on sait au moins une chose : en mai, François Hollande quittera définitivement l’Elysée.